Depuis 2012, les artisans de la région de Tombouctou, au Nord Mali, traversent l’une des périodes les plus difficiles de leur histoire. Jadis renommée pour son artisanat unique et son patrimoine culturel exceptionnel, la région a vu ses activités touristiques s’effondrer à cause de l’insécurité persistante. Tombouctou, autrefois un phare pour les voyageurs du monde entier, est désormais classée en zone rouge, ce qui décourage toute visite touristique depuis plus de dix ans.
Tombouctou, surnommée la « perle du désert », était autrefois une destination prisée par les touristes du monde entier, attirés par ses légendaires manuscrits anciens, son architecture soudano-sahélienne et ses artisans talentueux. Les visiteurs affluaient pour découvrir et acheter les créations artisanales locales : bijoux en argent, articles en cuir, textiles teints à l’indigo, et sculptures en bois. Cependant, cette effervescence appartient désormais au passé.
En 2012, le nord du Mali a été plongé dans le chaos suite à une rébellion armée suivie de l’intervention de groupes djihadistes. Ces événements ont entraîné 2la suspension de toutes les activités touristiques dans la région, privant ainsi les artisans de leur principale source de revenus. « Avant, nous pouvions vendre nos produits facilement aux touristes qui venaient des quatre coins du monde », se souvient Amadou, un artisan bijoutier de Tombouctou. « Aujourd’hui, nous avons du mal à joindre les deux bouts. »
L’insécurité comme principal obstacle
L’insécurité chronique dans la région de Tombouctou, marquée par des attaques sporadiques et des enlèvements, continue de freiner toute reprise de l’activité touristique. Les agences de voyage et les opérateurs touristiques ont déserté la région, laissant les artisans sans débouchés pour leurs produits. La perte de cette clientèle internationale a eu des répercussions dévastatrices sur l’économie locale.
En plus des menaces directes, l’insécurité a perturbé les chaînes d’approvisionnement. Les artisans peinent à se procurer les matières premières nécessaires à leurs créations. Les routes autrefois empruntées pour transporter les matériaux et les produits finis sont devenues trop dangereuses, isolant encore davantage les artisans de leurs marchés potentiels.
Des initiatives pour soutenir les artisans
Malgré ces défis, les artisans tentent de survivre grâce à de petites activités locales et au soutien de projets initiés par des ONG. Ces initiatives, bien que limitées, offrent un répit et permettent aux artisans de maintenir une activité minimale. Des programmes de formation et des ateliers sont organisés pour aider les artisans à diversifier leurs compétences et à améliorer la qualité de leurs produits.
Parmi les rares initiatives qui tentent de redonner vie à la culture et à l’artisanat local figure le Festival Vivre Ensemble. Cette manifestation annuelle s’efforce de rassembler les communautés et de promouvoir la cohésion sociale dans une région déchirée par les conflits. Le festival met en avant la richesse culturelle de Tombou2ctou, offrant une plateforme aux artisans pour exposer et vendre leurs créations.
Le Festival Vivre Ensemble est devenu une bouée de sauvetage pour de nombreux artisans. Bien qu’il ne puisse pas entièrement compenser la perte des touristes, il permet de maintenir une certaine visibilité pour l’artisanat local et de générer des revenus temporaires. Les habitants et les rares visiteurs locaux participent activement, créant ainsi un sentiment de communauté et d’espoir dans un contexte souvent désespéré.
Par ailleurs, des programmes de formation et de renforcement des capacités doivent être instaurés pour aider les artisans à diversifier leurs compétences et à s’adapter à un marché en constante évolution. Les artisans cherchent à maîtriser de nouvelles techniques et à s’ajuster aux préférences des clients internationaux afin de survivre dans ce contexte difficile.
Vers une lueur d’espoir ?
Si la situation reste critique, l’espoir demeure. La résilience et la détermination des artisans de Tombouctou sont admirables. Ils continuent de travailler avec passion et créativité, malgré les obstacles, dans l’espoir qu’un jour, la paix et la sécurité reviendront dans leur région, et avec elles, les touristes.
Face à cette situation alarmante, il est impératif que les autorités maliennes prennent des mesures concrètes pour soutenir les artisans de Tombouctou, véritables gardiens d’un patrimoine culturel inestimable. Car, au-delà de l’aspect économique, c’est toute l’identité culturelle de Tombouctou et du Mali qui est en jeu. Cela pourrait inclure des subventions directes, des initiatives pour promouvoir le commerce en ligne de l’artisanat local, et des programmes de formation pour aider les artisans à diversifier leurs compétences et leurs sources de revenus.
Il est également crucial de travailler à rétablir la sécurité dans la région. Une paix durable permettrait non seulement le retour des touristes, mais aussi la reprise de nombreuses autres activités économiques. La restauration de la sécurité serait un signal fort pour la communauté internationale, incitant les visiteurs et les investisseurs à revenir.
Ibrahim K. DJITTEYE