COUR SUPRÊME : LE MAGISTRAT DRAMANE DIARRA SAISIT LA SECTION ADMINISTRATIVE POUR FAIRE ANNULER DES DÉCRETS QU’IL DÉNONCE COMME ILLÉGAUX ET INEXISTANTS
Bamako, le 2 mai 2024 – Ce jeudi, un nouveau tournant judiciaire a été amorcé dans l’affaire opposant le magistrat Dramane DIARRA aux plus hautes autorités de la Transition. Un recours a été déposé devant la section administrative de la Cour suprême contre deux décrets présidentiels que l’intéressé qualifie d’« illégaux » et « inexistants ».
Ces textes sont à l’origine de sa révocation controversée de la magistrature.Les faits remontent au 19 septembre 2023, date à laquelle le Conseil de discipline du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) a rejeté les exceptions préliminaires et préjudicielles soulevées par Dramane DIARRA et son Conseil. Ceux-ci avaient alors immédiatement déclaré exercer un recours contre cette décision avant de quitter l’audience. Quelques heures plus tard, la révocation de M. DIARRA, sans suppression du droit à pension, a été annoncée via les réseaux sociaux – sans notification officielle.
Le magistrat a alors découvert, toujours sur les réseaux, un décret n°2023-0579/PT-RM du 3 octobre 2023 le concernant. Ce texte a été appliqué de facto, comme en atteste le non-versement de son salaire d’octobre 2023, en dépit de son absence de publication et de notification régulière.Estimant ce décret illégal, car signé par le Président de la Transition et non par un Président de la République dûment habilité, M. DIARRA a formé un recours gracieux le 26 octobre 2023. Il dénonçait une violation flagrante des textes fondamentaux : la Constitution, la loi organique sur le CSM, et le Statut de la Magistrature. Au lieu d’une rétractation, il a reçu, le 6 novembre, notification d’un nouveau décret (n°2023-0623/PT-RM du 16 octobre 2023) abrogeant le précédent.Un second recours gracieux a alors été formé dès le 7 novembre, contestant cette fois-ci les incohérences entre les deux textes, la substitution inexpliquée de décisions du CSM, et la tentative manifeste de rétroactivité du décret du 16 octobre.
Le Conseil de M. DIARRA a par ailleurs relevé des contradictions de structure et de contenu entre les versions des décrets publiées au Journal officiel et celles notifiées, soupçonnant une falsification manifeste.C’est ce qui a conduit à une plainte pour faux et usage de faux, déposée contre le Président de la Transition, le Secrétaire général du Gouvernement, le Premier ministre, et d’éventuels complices.
En effet, le décret n°2023-0579/PT-RM publié au Journal officiel n°31 du 3 novembre 2023 serait, selon le requérant, une version altérée du décret initialement structuré en deux articles, désormais transformée en un texte à trois articles identique au décret du 16 octobre.Pire encore, ce décret publié se « s’auto-abroge » en son article 2, ce qui le rendrait juridiquement inexistant. Le décret du 16 octobre, quant à lui, aurait été notifié avant sa publication au Journal officiel (le 10 novembre), contrevenant aux règles de droit en vigueur.Le recours introduit ce 2 mai 2024 vise donc l’annulation pure et simple des décrets n°2023-0579/PT-RM du 3 octobre et n°2023-0623/PT-RM du 16 octobre pour excès de pouvoir et violation des lois.
Il intervient dans le strict respect des délais de recours contentieux, faisant suite aux recours gracieux déjà engagés.Cette affaire pose une nouvelle fois la question de la régularité des actes administratifs sous le régime de transition et pourrait faire jurisprudence en matière de protection des droits des magistrats et de respect des procédures disciplinaires.