Le Mali poursuit sa trajectoire politique sous domination militaire avec la nomination du général Abdoulaye Maïga au poste de Premier ministre. Cette annonce, faite par décret présidentiel lu sur la télévision nationale ORTM, est survenue au lendemain du limogeage de Choguel Kokalla Maïga, ancien chef du gouvernement.
Depuis le double coup d’État de 2020 et 2021, les autorités militaires au pouvoir continue de resserrer son emprise sur les institutions de l’État. Avec la nomination d’Abdoulaye Maïga, les trois piliers du pouvoir – la présidence, le Conseil national de transition (organe législatif), et la primature – sont désormais contrôlés par des figures militaires. Ce renforcement de l’uniformisation militaire marque une étape supplémentaire dans la transition en cours.
Le départ de Choguel Kokalla Maïga, civil et critique aux autorités militaires illustre l’intolérance des militaires face aux voix dissidentes. Quelques jours avant son éviction, il avait dénoncé sur une chaîne publique le report des élections présidentielles prévues pour 2024 et critiqué les conditions de prolongation de la transition. Cette prise de position lui a coûté son poste, montrant que toute critique publique reste difficilement tolérée par les dirigeants actuels.
Quelques heures après la nomination d’Abdoulaye Maïga, le nouveau gouvernement a été formé. La continuité prédomine, avec une reconduction de la majorité des ministres en poste. Cependant, certains proches de l’ancien Premier ministre, comme Ibrahim Ikassa Maïga, ex-ministre de la Refondation de l’État, et Andogoly Guindo, ancien ministre de la Culture, ont été écartés. Ces ajustements marquent un éloignement stratégique des fidèles de Choguel Maïga, mais sans bouleversement majeur.
Âgé de 43 ans, le général Abdoulaye Maïga n’est pas un novice dans l’appareil étatique. Ancien ministre de l’Administration territoriale, porte-parole du gouvernement et vice-premier ministre, il s’est imposé comme un pilier de la junte, bien qu’il ne soit pas parmi les initiateurs du coup d’État de 2020. Sa nomination renforce l’idée d’une transition prolongée sous contrôle militaire.
Alors que les autorités de transition avaient initialement promis une restitution du pouvoir aux civils, aucune nouvelle échéance électorale n’a été fixée. Cette situation alimente les inquiétudes sur l’avenir démocratique du pays. Les militaires, solidement installés, semble prioriser le maintien de leur pouvoir, éloignant l’espoir d’une transition rapide et démocratique.
Avec une équipe gouvernementale en grande partie reconduite et un Premier ministre issu des rangs militaires, le Mali semble s’engager dans une transition où la continuité et le contrôle restent les maîtres mots, au détriment des aspirations à un retour rapide à un pouvoir civil.
Ibrahim K DJITTEYE